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Photo du rédacteurACCO A.S.B.L.

Lutte contre le blanchiment en République Démocratique du Congo (RDC) -Rapport d’évaluation mutuelle



Mesures de lutte contre le blanchiment de République Démocratique du Congo (RDC) Rapport d’évaluation mutuelle- Conclusions générales du Groupe d'Action Contre le Blanchiment d'Argent en Afrique Centrale (G.A.B.A.C.)

2021



1. Les autorités compétentes de la RDC ont globalement une faible compréhension des risques de BC/FT auxquels est exposé le pays. Toutefois, elles ont adopté la loi n°04/016 du 19 juillet 2004 pour encadrer la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Elles ont par ailleurs pris des initiatives institutionnelles visant à renforcer cette lutte, notamment la création de la Cellule Nationale des Renseignements Financiers (CENAREF), du Comité consultatif de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (COLUB), du Comité National de Coordination de Lutte contre le Terrorisme international (CNCLT), du Fonds de Lutte Contre le Crime Organisé (FOLUCCO) et de l’Observatoire de Surveillance de la Corruption et de l’Ethique Professionnelle (OSCEP). Mais ce cadre juridique n’est pas adapté aux Recommandations du GAFI, telles que révisées en 2012, et les ressources mobilisées ne permettent pas au cadre institutionnel de produire les résultats satisfaisants.


2. La RDC est particulièrement exposé à des risques de BC liés à l’intégration dans le système financier des produits issus de la corruption, des détournements de deniers publics, de la fraude douanière et fiscale, du braconnage, du trafic d’espèces fauniques et d’essences forestières protégées, du trafic des minéraux. Ces risques sont accentués par des vulnérabilités inhérentes à l’importance du secteur informel, la prépondérance de l’utilisation du cash dans les transactions financières, le faible niveau de l’inclusion financière et l’insuffisance du cadre législatif et réglementaire encadrant les EPNFD et les ASBL.


3. Le risque de FT est également important en raison du contexte sécuritaire marqué par l’activisme de groupes et bandes armés, l’instabilité de certains pays voisins dans la partie orientale et la porosité des frontières.  La RDC n’a pas encore défini des procédures et mécanismes de traitement des listes établies au titre des Résolutions 1267 et 1373 de Nations Unies, d’où la difficulté de mise en œuvre des sanctions financières ciblées contre les personnes listées. Les procédures de gel et confiscation des avoirs et autres biens des terroristes ne sont ni définies, ni mises en œuvre.  La RDC dispose d’une cellule de renseignements financiers (CENAREF) qui traite, analyse et dissémine les déclarations qu’elle reçoit des entités déclarantes relatives aux soupçons de BC/FT. Le nombre de DOS reçues par cette cellule reste très faible au regard de la démographie et du potentiel délictuel du pays. Vingt (20) rapports ont été transmis aux autorités judiciaires, mais un seul a donné lieu à un jugement à la suite d’une requalification des faits. La CRF congolaise a une opérationnalité limitée. Elle ne dispose pas de système de sécurisation fiable des informations. La protection des informations transmises à cette structure est souvent remise en cause par certains assujettis qui expliquent ainsi la faiblesse du nombre de DOS transmises malgré la structuration de l’environnement criminogène.


4. Le dispositif congolais de LBC/FT est fragilisé par la capacité et l’intégrité morale assez limitées des enquêteurs et des magistrats dans le cadre des poursuites judiciaires sur le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.  Les insuffisances du cadre législatif et réglementaire laissent certaines IF et EPNFD en dehors du champ d’application de l’ensemble des mesures préventives relatives à la LBC/FT. En ce qui concerne le devoir de vigilance relatif à la clientèle, des instructions ont été publiées par la Banque Centrale du Congo (BCC) pour compléter et faciliter l’application de la loi anti-blanchiment, en vue de la mise en œuvre efficiente des obligations de vigilance. Celles-ci ne s’appliquent cependant qu’aux Etablissements de crédit (banques, IMF, COOPEC, caisses d’épargne, institutions financières spécialisées, sociétés financières), excluant les autres institutions financières du champ d’application, notamment le secteur des assurances, les établissements de monnaie électronique et les services financiers de la Poste.


5. Le secteur bancaire de la RDC a globalement une compréhension basique des risques de BC/FT et met en œuvre les mesures de vigilance à l’égard de la clientèle et de vigilance constante des opérations, quoique de manière peu satisfaisante. Par contre, les secteurs de la microfinance et des coopératives d’épargne et de crédit, de change manuel, de transfert de fonds et de valeurs, de monnaie électronique ou encore celui des assurances, n’ont aucune compréhension des risques de BC/FT que représentent leurs clients, produits ou services ; ce qui se traduit par une faible mise en œuvre des mesures préventives par les acteurs de ces secteurs dont certains sont pourtant confrontés à des risques élevés de BC/FT. De manière générale, la mise en œuvre satisfaisante de l’obligation de vigilance est confrontée au défaut de pièces d’identification sécurisées en RDC, ce qui rend difficile la connaissance du client.  Au niveau de la régulation et du contrôle, la BCC a une certaine compréhension des risques de BC/FT. Elle a mis en place des mécanismes de contrôles prudentiels périodiques qui incluent des contrôles sur place, mais leur efficacité est toutefois limitée. L’approche de cette supervision n’est pas fondée sur les risques de BC/FT étant donné qu’aucune étude visant à établir les risques sectoriels n’a encore été menée et les sanctions prononcées ne concernent pas le volet LBC/FT alors que les IF présentent des défaillances en la matière. L’ARCA, de création récente, ne dispose pas encore de méthodologie et d’outils appropriés pour assurer une supervision de LBC/FT dans le secteur des assurances. Le secteur des EPNFD est dépourvu d’autorités désignées de supervision en matière de LBC/FT, malgré les risques élevés de BC/FT qu’il représente dans une économie marquée par l’informel et une circulation abondante du cash.


6. La RDC dispose d’un cadre juridique satisfaisant en matière d’entraide judiciaire et d’extradition. L’effectivité de sa mise en œuvre demeure toutefois très limitée dans le domaine de la LBC/FT du fait de l’inexistence de demandes reçues et de requêtes émises. La coopération des autorités compétentes en matière de LBC/FT est relativement active au niveau de la CENAREF qui, bien que n’étant pas membre du Groupe Egmont, échange des renseignements de manière réactive avec des homologues étrangers avec lesquels elle a signé des protocoles d’entente. Elle est cependant moins perceptible au niveau des autorités de régulation et de contrôle des IF, de la douane et de la police qui pourtant disposent des pouvoirs légaux et réglementaires pour conclure des accords de coopération leur conférant la capacité générale de partager des informations avec des homologues étrangers dans le cadre de leurs missions. En outre, la douane congolaise est membre de l’OMD et la police est membre de l’OIPC-Interpol (Organisation International de Police Criminelle). Ces deux organismes internationaux offrent des plateformes d’échanges d’informations.

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